Rapport d'évacuation de Fjollen
par Vinfried Bjornfal
Mon nom est Vinfried Bjornfal, anciennement éclaireur pour la Quatrième Compagnie des armées de Valgaard. Je dis anciennement car j’ai été réassigné à la troisième compagnie après l’éradication de ma Compgnie aux mains de… choses… sorties d’un portail ayant englouti la ville de Fyrstrad. À ce jour je ne peux toujours pas décrire ce que c’était ou ce qui s’est passé… franchement, j’en fais des cauchemars et je préfère me coucher dans ma tente alors que mes collègues s’assoient autour du feu le soir. “Vinfried, y a pas à craindre” qu’ils me disent.
Ils ne peuvent pas comprendre…
Aux vues des conséquences du portail de Fyrstrad, leurs majestés ont décidé d’évacuer la cité portuaire de Fjollen. La décision est tombée peu après avoir joint la compagnie et sitôt nous étions dépêchés afin de gérer les efforts de relocalisation de la population et de prêter main forte aux citoyens. Aucuns rapports ne mentionnent des créatures ou des dangers, ce qui me rassure grandement.
Ma survie aux événements m’a rapporté une promotion, un maigre baume sur la situation et la perte de mes collègues… excusez-moi si j’en parle souvent, les souvenirs sont encore à vif…
La compagnie s’est déplacée vers Fjollen, arrivant en quelques jours avec une caravane de vivres à distribuer. Au loin nous voyions toujours le grand de nuage de brume, je m’empressai de dire à mon officier supérieur de s’en tenir très loin. Ils avaient entendu l’histoire, ils me prirent au mot.
L’arrivée du convoi en ville a été un message très mixte. D’une part cela voulait dire que les Rois n’avaient pas oublié leur peuple et étaient là pour s’en occuper, de l’autre cela voulait dire qu’ils avouaient que la situation était plus risquée qu’anticipé et que de nouveaux temps difficiles étaient à l’horizon. Je comprenais leur malaise, mais mes ordres étaient clairs.
« Peuple de Fjollen, par décret royal, la ville de Fjollen doit être évacuée. L’armée est présente pour vous aider dans ce processus. Veuillez emmener l’essentiel et embarquer sur les navires. Tout marchand doit venir s’enregistrer auprès du Capitaine Erikfal qui vous donnera des instructions pour la sauvegarde de votre marchandise onéreuse. La ville sera sous la protection de l’armée, veuillez agir dans le calme et dans l’ordre! »
Les crieurs répétèrent ce message partout en ville et la tension montait à chaque répétition. Erikson fut très rapidement enseveli de demandes, le quartier-maître pris seul pour s’occuper d’un groupe de négociateurs et de marchands tentant tous de se négocier un peu plus que ce qui leur était alloué dans les caravanes et sur les navires. Le Capitaine Erikfal est un homme de loi, fier et droit. Toute tentative de le soudoyer aurait été reçue avec hostilité, réprimande et probablement une arrestation, mais maintenant n’était accueilli que par un non poli et un soupir.
D’autres étaient beaucoup plus échaudés par les événements. La capitaine Franzlanya elle avait été mise en charge de patrouiller les rues et de prêter main forte à la garde pour garder la paix.
Elle revenait au camp de base irritée et désespérée, souvent avec un quelconque malandrin menotté. « C’t’ordure tentait de dévaliser l’épicier. Bordel, on a encore à manger, pas la peine de voler UNE pomme! » Elle s’est dégotté une entente avec un tavernier du coin pour un rabais substantiel sur l’alcool qui voulait écouler ses stocks. Elle en a profité.
Somme toutes les choses allaient bien. C’était chaotique, difficile, long et nous brisait le coeur de voir ces pauvres gens arrachés à leur demeure, mais aucun incident n’est arrivé… sauf un.
Le maître du port est venu nous voir aux petites heures du matin, à la fois affolé et gêné. Une poignée de vaisseaux étaient partis durant la nuit malgré l’ordre de réquisition de tous les navires à quai à Fjollen. Où étaient-ils, où allaient-ils, impossible de le savoir. La rumeur voulait qu’ils étaient des déserteurs terrifiés ayant décidé de s’installer ailleurs aux vues de la grande malchance qui semblait s’abattre sur Valgaard. Pour l’histoire complète, il faudra leur demander si on parvient à les retrouver.
Les efforts prirent quelques jours avant que la première vague soit prête à partir. Une fois les charrettes remplies et les ancres levées, nous accompagnions tous ces gens forcés de laisser leur chez-soi derrière au mains de brutes sanguinaires. Je comprenais leurs appréhensions. La ville serait sous contrôle militaire, pour le meilleur comme pour le pire, et ce jusqu’à ce que cette crise soit passée.
« Comptez-vous chanceux d’être ici et non pas là-bas. » Je pointai vers le brouillard de Fyrstrad, tous se sont tu. Je ne sais pas si je préférais la panique où le silence laissant entendre les craintes de chacun.