Le Culte de Cent-Secrets
Le Culte des Cent-Secrets est une organisation religieuse des plus énigmatiques pour les non-initiés. Sa récente fondation dans un village reculé ainsi que ses nombres négligeables font de ses croyances et ses rites l’objet de spéculation parmi ceux qui en apprennent l’existence. C’est un mysticisme qu’ils cultivent activement, se méritant donc le sobriquet de Culte des Cent-Secrets.
Le refus du divin
Le Culte s’est défini à sa fondation par une négation : les Dieux n’aident pas les hommes. Leur existence étant grandiose et incompréhensible pour les mortels, pourquoi leurs machinations les prendraient-ils en compte ? Comment est-ce qu’une fourmi peut faire en sorte que le soleil entende ses supplications ? C’est ce que Maître Wilhelm, le philosophe à l’origine de l’idéologie humaniste du Culte, énonça dans son traité «Le Refus du divin», distribué auprès des élites pensantes des Terres Connues. Lorsque l’Église de Dieu eut vent de la publication sacrilège, un ordre d’arrêt fût émis au nom de l’érudit. Partout en Aslande, les Chevaliers de la Providence expulsèrent les adhérents de la pensée de Wilhelm de leurs foyers et brûlèrent toute copie du Refus qui leur tomba sous la main. Les intellectuels furent condamnés à l’exil pour possession de littérature hérétique. On amena Maître Wilhelm à Saint-Castel pour préparer son exécution sommaire et sans cérémonie. On raconte cependant qu’un prêtre de l’Église prit le pauvre homme en pitié et demanda à ce qu’on entende au moins ses dernières paroles. Sans hésiter ni faillir, le condamné récita haut et fort une prière à Dieu le Créateur. Il est dit que le Vicaire en charge de l’exécution vacilla et tomba à genoux, ému par la sincérité des mots du philosophe. Il fut détaché de son bûcher et se vit accorder une place dans le corps ecclésiastique, qui le vit grimper les rangs de Saint-Castel en trombe. Il fut canonisé Saint-Père Redimivus Ier une vingtaine d’années après son pardon. L’Église prospéra sous sa gouverne. Lorsque la vieillesse le prit, on l’enterra avec tous les honneurs dans les catacombes de la Basilique. C’est avec beaucoup de consternation que l’on constata bien plus tard que les ossements du Saint-Père avaient été subtilisés. Les théories les plus folles suggèrent que l’on conserve ses restes dans la Carmine Chapelle servant de refuge aux cultistes.
Le Sang Sacré
L’idéal humaniste proclamé par Maître Wilhelm s’éloigna des grandes cités d’Aslande avec ses contacts exilés. Ils s’installèrent à Tournetombe pour éviter les regards indiscrets, la réputation du village suffisant à en éloigner les curieux. Dans une chapelle abandonnée ils trouvèrent refuge et débattirent. En quoi peut-on croire si on ne croit pas à l’influence du divin ? Si les dieux ont oublié les mortels sur terre, qu’est-ce qui est sacré ? Le mortel, dirent tous et chacun. Tout ce qui est mortel, au-delà de toute différence, porte en soi du sang, récipient de la vie. Le mortel, le sacré, le sang qui les unit tous. Dans cette révélation, la plupart se retrouvèrent. Au fil des ans, des départs de certains et des arrivées de nouveaux adhérents, le message originel du philosophe s’estompa et se pervertit. Le sang des mortels les rend tous égaux : tous ceux qui le répandent sont des tueurs ; tous ceux qui s’en vident meurent. Plus rien n’était saint ou sacré aux yeux de ces hommes outre leur propre existence, leur soif de connaissance de soi, de perfection de soi, de domination de soi. Cet humanisme fanatique effraya plusieurs des fondateurs de l’organisation. Quelques-uns fuirent. D’autres, acculés par des membres plus zélés de ce qui devenait le Culte du Sang Sacré, s’enlevèrent la vie pour échapper aux méthodes cruelles des nouveaux arrivants. Des intellectuels originaux il n’en restait qu’un seul au sein du Culte. Un aslandais du nom d’Adalric, cet homme ne céda pas au fanatisme proposé par le Culte. Il se saisit d’une arme et calma les ardeurs des cultistes. Il dénonça la cruauté avec laquelle ils avaient provoqué ses confrères, leurs morts inutiles, leurs disparitions soudaines. «Ce sang que vous disiez sacré, il n’en revenait pas à vous de le verser. Ne saignez que vous-mêmes, et craignez le sang d’autrui. Vous n’avez pouvoir sur personne, comme le divin n’a aucun pouvoir sur vous.»
La raison de ses propos prit le Culte de court. Le zèle et le perfectionnisme devaient laisser place à la logique et à la fraternité. C’est ainsi qu’Adalric de Tournetombe devint le premier Curé du Culte du Sang Sacré, et plus tard, leur premier Exorciste.
Prière
Dans ma douleur, j’ouvre mes yeux aux vérités de ce monde, versant mon sang, seul maître de mon existence : à tout le Sang jadis versé, je commande de… [nom du sort]
Les «Secrets»
Un ordre réservé et discret, le Culte du Sang Sacré suit des doctrines qui sont souvent nébuleuses pour les non-initiés. Certains diraient même que leurs pratiques peu communes les acoquinent avec la sorcellerie et les arts profanes. Cette allégation est une injure grave pour tout cultiste, puisqu’ils se doivent de contrôler quelconque don magique ils possèdent, sans quoi ils ne sont que des serviteurs de leur pouvoir.
Il reste néanmoins quelques préceptes importants au Culte qui ne sont partagés qu’auprès des initiés, et qui sont donc les secrets éponymes au surnom populaire du groupe.
Dans la douleur, la clarté
Si l’expérience mortelle est si diverse qu’il est impossible de comparer l’existence d’un être à son voisin sans y trouver au moins une incompatibilité, il reste une sensation qui unit toutes les créatures : la douleur. Dans ce rappel nerveux de l’existence et du désir inné du corps de la protéger, les cultistes se retrouvent tous. C’est ce pour quoi ils trouvent du soulagement dans la douleur, qui est une communion avec la mortalité. L’auto-mutilation rituelle est donc une part intégrale des rites et cérémonies du Culte. Les cultistes qui sont appelés à oeuvrer en-dehors de la Carmine Chapelle se servent aussi de la douleur qu’ils subissent ou qu’ils s’infligent pour conserver une concentration profonde et une volonté de fer.
Dans la découverte, l’occlusion
Dans la compréhension du mortel et de ses capacités, il y a la connaissance des limites du savoir. Il y a des secrets qui devraient être oubliés, des découvertes qui ne doivent jamais se faire, des curiosités à ne jamais assouvir. Le mortel est faillible de par nature. On ne peut donc pas lui confier certains savoirs immémoriaux sans qu’il ne les pervertisse et en abuse. Certains initiés deviennent donc des Obfuscators. Ces braves vigiles conservent l’étrange et le vil au-dehors des esprits communs, et s’assurent que leurs murmures soient tus à jamais.
Dans la mort, la servitude
La dernière limite du mortel est, bien évidemment, la mort. C’est donc avec le plus grand des respects que les nécromanciens du Culte préparent les dépouilles des cultistes, en longue communion avec l’âme du défunt. Avant leur départ final, on leur demande s’ils désirent que leurs restes soient utilisés par les Exorcistes dans leur formation de leurs acolytes. Rares sont ceux qui refusent : l’enveloppe charnelle qui était leur ne peut plus servir autrement. Les esprits partent donc en paix, et le Culte se renforce.
Tournetombe et la carmine chapelle
Situé dans les bordures de la vallée de Navram, le village de Tournetombe a piètre allure et ne reçoit que très peu de voyageurs. Cette isolation et la présence d’une chapelle abandonnée de l’Église de Dieu offrent au Culte une base d’opérations idéale. Au fil du temps, le lieu de prière fut réaménagé en enceinte aux multiples utilités. La nef sert désormais de lieu de rituel où les cérémonies du Culte sont célébrées. Le roc du sol y a été gravé pour représenter la Versée, et les gouttières y recueillent le sang qui s’écoule lors des cérémonies pour remplir le symbole.
«Maleficarum» : ennemis des mortels
Tout ce qui n’est pas mortel n’est pas né de ce monde et n’y mérite pas une place, il est du devoir des exorcistes et des nécromanciens de les renvoyer là d’où ils viennent si possible. Si cela s’avère ne pas être une option, ils tenteront alors de détruire l’entité concernée. Le monde des hommes appartient aux hommes, et la justice des êtres extérieurs n’y sera pas tolérée.
Anges et démons
Les Enfers et l’Élysée attendent les âmes des mortels. En quoi ont-ils donc le droit de venir les chercher sur Terre? C’est ce qui stupéfie les cultistes. Pourquoi des créatures de ces deux mondes se mêlent au nôtre? Leurs natures extrêmes sont dangereuses pour les mortels : les démons pactisent, manipulent et séduisent ; les anges se font juges, jurés et bourreaux. Leur présence est donc indésirable, et par la ruse le Culte doit donc s’en défaire.
Esprits et Faes
Une âme qui échappe à son corps en laissant sur Terre des conflits, des dettes ou des promesses est éternellement damnée. Elle ne peut se départir de sa mortalité et erre dans l’espoir de régler son départ. Certaines âmes désirent trop vivre et s’empressent de tenter de posséder une autre enveloppe de chair. Ces deux cas nécessitent l’attention d’un nécromancien, qui négocie avec les esprits pour les satisfaire, ou d’un exorciste, qui les fait partir avec force.
Plus subtil, alien et envahissant sont les Faes qui se jouent des mortels pour avoir ce qu’ils désirent de leurs escapades dans le monde matériel. Incapables de comprendre l’humanité, ces êtres ont une moralité en-dehors de toute logique mortelle. Ils doivent être sommés eux aussi de partir.
Symbole: La versée
Deux mains se joignent dans un geste méditatif, du sang coulant entre leurs doigts pour s’en échapper. Ce simple symbole représente l’idéologie du Culte du Sang Sacré, de verser son sang pour être meilleur. La fuite du sang fait une figure métaphorique de la mortalité des êtres qui, goutte à goutte, les rapproche du repos.
Titres
Initié
Le premier titre d’un cultiste, attribué lorsqu’il passe le rite d’initiation.
Acolyte
Titre donné à un initié s’étant mérité d’aider un Curé, un Obfuscator ou un Exorciste. Généralement un cultiste doté d’une certaine expérience martiale.
Curé
Sans être nécessairement détenteurs de magie dite divine, les Curés sont les maîtres des cérémonies, et il leur incombe de les conduire.
Obfuscator
Agents envoyés pour récupérer les savoirs occultes et les cacher du reste du monde.
Exorciste
Cultiste instruit dans les voies du combat et de la nécromancie, le dernier recours contre les créatures qui n’appartiennent pas au monde des mortels.
Premier Exorciste
Titre donné à l’Exorciste qui forme les initiés au combat et donne les directives aux autres exorcistes.
Apostat
Un membre du culte qui s’est vu excommunié pour avoir abusé des dons du Sang Sacré pour assouvir sa soif de pouvoir, ou bien pour avoir renié la mission du Culte.
Cérémonies
Initiation
L’acte de la première versée de sang d’un cultiste et de son observation de la nature de la douleur. L’incision est supervisée par un Curé, puis l’initié est laissé à lui-même pour méditer le geste et sa gravité. Ceux qui n’ont pas la force mentale de s’initier sont intimés de quitter les lieux et de ne jamais revenir.
Exsanguination funéraire
Le cadavre du cultiste défunt voit ses artères majeures ouvertes aux yeux de tous, afin de rendre son sang à la Chapelle. Cette méthode de momification partielle permet de mieux conserver les corps qui seront utilisés comme morts-vivants.
Exorcisme
L’appel à la raison d’un exorciste et d’un nécromancien qui tentent d’apaiser un esprit. Plusieurs méthodes de communication seront essayées, et il est impératif de déterminer quelle attache garde le défunt emprisonné parmi les mortels. Ses derniers voeux doivent être exaucés, sauf s’ils sont destructeurs, auquel cas les restes de l’âme seront détruits. Si l’esprit n’entend pas raison, il sera détruit de toute façon.